jeudi 26 juin 2014

Coeur sensible s'abstenir


Dépression.

Ce mot fait peur a bien de gens et d'autres en rit. Honte à vous si vous faites partie de ses derniers. Je ne me considère pas une experte, mais j'y suis passé et plus d'une fois.
Ça arrive sans qu'on s'en rende conte et surtout sans qu'on le veuille.
Ça nous change, on ne sait plus qui on est.
On joue la comédie avec tout le monde.
On fait semblant que ça va, parce qu'on a pas de raison d'aller mal. On ne peut pas se permettre cela. On a plus de forces pour quoi que ce soit. L'énergie qu'on a, on s'en sert pour se détester, pour se souhaiter la mort.
On voudrait rester dans son lit et dormir, juste dormir.
Surtout ne voir personne. Tenir une conversation est tellement douloureux, difficile.
La mémoire nous fait défaut. On ne se souvient pas de ce que l'on a fait la veille, de ce qu'on a mangé le matin même.
On pleure dans la douche parce que c'est le seul endroit où on ne vous entend pas.
On est étourdis quand on est trop longtemps debout, le souffle nous manque.
Même respirer est devenu difficile.
On fait de l'insomnie. Le genre d'insomnie qui fait que tu vois chaque minute de ta nuit passer.
Quand tu trouves enfin le sommeil, le vrai, et que tu te réveilles, la noirceur te rentre dedans d'un coup et tu paniques.
Les gens autour ne comprennent pas pourquoi, ils te trouvent lâche, paresseuse.
Tu es seule au monde.
Voilà.
Kiliam est né le 17 février 2013. À sa fête de 1 an, je souffrais encore tellement. La tristesse et la honte me grugeaient par en dedans. Et pourquoi ça ? Je n'arrivais pas à ressentir de l'amour pour mon fils. Même que parfois, j'arrivais à le détester. Ben oui, je sais que ça ne se dit pas, mais va bien falloir un jour que quelqu'un parle des vraies affaires. Mon garçon, je lui en voulais terriblement. Je lui en voulais de me faire vivre tout ça. Tous ces pleurs et ces heures d'inquiétudes. Je lui en voulais d'avoir prit la place de mon bébé parfait. Je lui en voulais pour toutes ces nuits à l'hôpital. Je lui en voulais d'être comme il était et de me forcer à vivre cette vie-là. J'étais fâché et honteuse d'avoir besoin d'un psy, d'une travailleuse sociale (même deux), de clair foyer, et même d'une famille de répit. Comment il avait pu me faire ça ? Moi qui aspirais seulement à être une petite maman normale avec un travail, me voilà devenue maman d'un enfant handicapé. Croyez-moi, toute une différence ! J'étais tellement dans la noirceur pendant la première année de sa vie que j'ai souhaité sa mort à chaque jour qui passait. (OK, je précise que j'ai pris soin de mon coco comme d'une pierre précieuse et jamais je ne lui aurais fait de mal.) Mais pouvez-vous, vous imaginez une minute, de ce que c'est pour une mère que de ressentir cette haine pour son propre enfant ? Ce fait même, me fessait mal en plus de tout le reste. Je voyais tous ces autres parents d'enfants différents qui aimaient leurs enfants comme on doit le faire normalement et je ne comprenais pas comment ils y arrivaient.
Au fond, c'est comme si j'avais eu une grosse grippe. Quand tu as mal à la gorge et à la tête, tu frissonnes blotti sous une tonne de couvertures et tu te dis que tu étais dont bien hier. Hier encore, tu te sentais bien et tu ne te rendais même pas conte à quel point tu étais bien. Et puis, quand tu guéris, tu te sens bien de nouveau et tu oublies le mal. Et bien, moi ma grippe, je ne l'oublie pas. Elle a été tellement douloureuse, vicieuse et longue. Impossible à oublier. C'est pour ça que maintenant, je savoure ces moments de calme. Ces moments où je réussis à être bien malgré tous ces défis quotidiens avec mon fils.
Je me souviendrai toujours de cette année de douleur. C'est elle qui me permet aujourd'hui d'être un peu plus près du bonheur. Parce que j'ai longtemps pensé qu'avec Kiliam, je ne serais jamais heureuse. Maintenant, je comprends que c'est faux. Je pense que j'ai la capacité d'être encore plus heureuse, car j'ai goûté à l'enfer. Maintenant, Kiliam est une source inépuisable de petits bonheurs. Je l'aime comme une folle et ça me soulève constamment. Un certain jour du mois dernier, je l'ai pris dans mes bras, on s'est regardé pendant de longues minutes et j'ai su. J'ai su que je l'aimais et que personne ne pourrais m'enlever cela. Xxx


jeudi 19 juin 2014

Petit homme va bien, maman aussi!


D'habitude, j'ai tendance à écrire quand ça va mal. Comme un exutoire, une façon de m'enlever tout ce mal qui me ronge. Mais aujourd’hui, ça va bien ! Et dans ma vie, aller bien, signifie surtout que Kiliam est en forme. Ses poumons vont bien, son nez ne coule pas, il ne tousse pas, il ne s'étouffe pas, il ne vomit pas, il ne fait pas de fièvre, il mange et boit bien et tout ça en même temps ! En fait, ça me fait tout drôle. C'est comme s'il était un autre bébé. Et ce nouveau bébé, je ne l'ai pas vu depuis l'automne dernier. Alors, je réapprends à le connaître. J`imagine que je dois dire que je l'aime autant que l'autre... Mais en fait j'ai une petite préférence, mère indigne que je suis. Je l'aime vraiment beaucoup ce petit bébé en santé! Il est mignon, crocable ! Il rit toujours ! Il fait des drôles de grimaces, comme s'il découvrait qu'il avait des muscles sous son visage. Il dort bien aussi, il respire bien pendant son sommeil. Jaime beaucoup ce petit, parce qu'on peut faire du travail avec lui. Il progresse mieux que l'autre bébé. Ce bébé, pour la première fois cette semaine, j'ai vu dans ses yeux qu'il savait que j'étais sa maman. Ses petits yeux qui brillait comme jamais ils n'avaient brillé en me voyant et ce sourire (pas de dent) tout à fait différent de tout les autres depuis un an. Ce moment fut, je crois le plus beau depuis toute sa vie, pour moi. Je l'ai retrouvé mon champion. J’espère juste qu'il ne partira pas trop souvent.. Au moins, maintenant, je sais que je vais le retrouver.

jeudi 5 juin 2014

L'enfant souriant


-Ton bébé à la trisomie 21 ?! Ah ! Il doit toujours être souriant !
On m'a sorti ça aujourd'hui, encore.
-Ah! Ces enfants la, ce sont des enfants toujours heureux! 
Ce sont des enfants du soleil! 
Ah bon ? Vraiment ? On m'a lancé ces fameuses phrases dès les premières heures de vie de mon coco trisou. Comme si cela, devait être une consolation, là tout de suite. Une consolation pour tout le reste. Comme si, étant donner que j'ai un enfant souriant, j'oubliais son handicap, toutes ses hospitalisations ou encore tous ses rendez-vous médicaux. 
-Tu vas voir, il va t'apporter tellement de bonheur!
Heu.. Oui tout comme mon petit gars de 21 mois, qui est en parfaite santé. Je suis désolé, si le fait de me faire annoncer que mon enfant ne fera jamais de grandes écoles ou ne pourra jamais conduire de voiture ou avoir d'enfant ne se console pas avec une phrase telle que mon enfant sera souriant!  Un enfant souriant, j'en ai un a la maison et il n'est pas trisomique. Cet enfant me souriait à 1 mois et riait aux éclats à 4 mois à peine. Même avec un chromosome en trop, Kiliam n'a pas rit la moitié autant que son frère au même âge. 
Ok, c'est vrai qu'il est souriant mais, jusqu'à maintenant, pas plus qu'un autre enfant.  Oui, peut être qu'à l'âge adulte, il sera plus "heureux" que tout le reste du monde. Mais cela n'est pas une consolation pour un parent ! Parce que cela veut dire que mon enfant n'aura pas la capacité intellectuelle de se rendre compte de ce que c'est la vie. C'est sa déficience intellectuelle qui l'empêchera aussi de mener une vie normale, indépendante. C'est ce chromosome du bonheur qui me donnera des cheveux blancs avant tout le monde et qui fera de moi une maman inquiète jusque dans ma tombe. 
-Tu vas voir, il va tellement t'apporter ! 
Bon, celle la aussi elle est pas pire ! Bin oui, c'est vrai qu'il me fait vivre de beaux moments.  Et oui, je cours partout comme une poule pas de tête quand il fait le moindre progrès! Bin oui, parce que ça fait des mois que l'ont travail pour en arriver là ! Je n'ose même pas imaginer le jour où il fera ses premiers pas, probablement entre 2 et 3 ans. Je pense que j'aurais de quoi être contente puisque que ça fera tout ce temps que je l'aurai porté dans mes bras ! 
Ensuite, vers 5 ou 6 ans, il sera le temps de le mettre propre.. Et vous pensez que ses sourires annuleront toutes ces années de difficultés à apprendre ces choses que tout les enfants ordinaires apprennent d'eux mêmes ?  Bin non! C'est l'Amour qui me portera et seulement l'amour. Alors, la prochaine fois que vous rencontrer un parent d'enfant trisomique, au lieu de dire qu'il sera "joyeux" dites plutôt : 
- Ton enfant à la trisomie 21? Ah! Tu l'aimeras tellement!